Communiqué de l’Atelier de Développement et d’Investissement en Afrique

12-13 NOVEMBRE 2017

PRETORIA, AFRIQUE DU SUD

Voici un communiqué reflétant les résultats de l’atelier sur le développement et l’investissement en Afrique qui a eu lieu les 12 et 13 novembre 2017 à Pretoria, en Afrique du Sud, et qui a été organisé par la Coalition pour les droits humains dans le développement avec l’African Coalition for Corporate Accountability (ACCA).

L’événement a réuni 43 participants de plus de 30 groupes de la société civile de 14 pays d’Afrique et d’ailleurs. Cet évènement a donné lieu à deux jours de partage des compétences, de développement stratégique et de plaidoyer permettant de structurer les investissements consacrés au développement dans la région afin d’assurer une plus grande durabilité sociale et environnementale des communautés de première ligne, mais aussi un dialogue avec des fonctionnaires responsables du développement de plusieurs institutions et agences financières internationales.

LES PARTICIPANTS:

ONT CONSTATÉ que partout dans le monde, les gouvernements, les banques de développement, les agences de crédit à l’exportation, les investisseurs institutionnels et les sociétés privées ont des vues sur l’Afrique. Le discours dominant qui alimente ces investissements est que l’Afrique fait face à un énorme déficit de financement public en ce qui concerne des besoins relevant du développement qui doivent être couverts par des investissements du secteur privé.

ONT SOULIGNÉ que si les besoins relevant du développement de nombreux pays africains sont effectivement importants, les défis en matière de droits humains et d’environnement sont également importants. Ces besoins ne peuvent être satisfaits que si les investisseurs publics et privés, les gouvernements africains et les institutions de développement collaborent activement avec les communautés africaines et les groupes de la société civile pour identifier les priorités de développement, élaborer et mettre en œuvre des stratégies de développement et surveiller et se protéger contre les impacts sociaux et environnementaux négatifs.

ONT EXPRIMÉ LEUR INQUIÉTUDE concernant le fait que l’augmentation des flux financiers privés sans tenir compte de l’environnement propice à une participation significative du public et à la gestion sociale et environnementale peut en réalité faire obstacle aux objectifs de développement et avoir des incidences négatives graves sur les droits humains.

ONT OBSERVÉ que les communautés sont la pierre angulaire du développement durable et la sauvegarde du droit des communautés à participer et à bénéficier du développement est entériné dans l’article 22 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

A CONSTATÉ que l’Agenda 2063 de l’Union africaine énonce des objectifs importants pour le développement sur le continent, y compris une croissance inclusive, le respect des droits humains et un développement axé sur les personnes. Il reste cependant à voir si ces objectifs seront reflétés dans les plans de développement nationaux et les initiatives et investissements régionaux et mondiaux.

ONT RECONNU qu’une myriade d’initiatives d’investissement en Afrique, notamment le Programme de développement des infrastructures en Afrique, le programme «Cinq grandes priorités» de la Banque africaine de développement, l’initiative “Power Africa” et le Pacte du G20 avec l’Afrique incitent à effectuer pour plus d’investissements et de mégaprojets.

ONT EXPRIMÉ LEUR INQUIÉTUDE face au fait que beaucoup de ces initiatives sont axées sur la création d’un environnement propice aux investissements privés – y compris des réformes réglementaires de grande envergure, l’affaiblissement des lois du travail et de l’environnement, des lois foncières et fiscales, privilégiant les investisseurs privés par rapport à l’intérêt public.

ONT EXPRIMÉ LEUR INQUIÉTUDE que bien que ces décisions d’investissement en Afrique aient de profondes répercussions sur la vie des populations et le développement national et régional, la société civile africaine, les peuples autochtones et les communautés de première ligne n’ont pas eu accès à l’information ou à un siège à la table des négociations.

PAR CONSÉQUENT, LES PARTICIPANTS RECOMMANDENT CE QUI SUIT EN CE QUI CONCERNE LES GOUVERNEMENTS AFRICAINS, LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES DE DÉVELOPPEMENT ET LES INVESTISSEURS:

  • Les gouvernements africains et les institutions financières de développement devraient respecter les droits des communautés, et en particulier des groupes marginalisés, de déterminer leurs propres voies et objectifs de développement, et de bénéficier des initiatives de développement – le développement devrait être mené par la communauté.
  • Les gouvernements africains et les institutions financières de développement doivent adopter une approche fondée sur les droits et sexospécifique ainsi que des garanties pour que les droits humains des communautés et des groupes de la société civile soient respectés et protégés. Ils devraient être tenus responsables en cas de violations des droits humains ou d’impacts négatifs sur les communautés.
  • La Banque africaine de développement, les autres banques de développement et les agences de crédit à l’exportation opérant en Afrique doivent être plus transparentes, offrir un accès complet à l’information et un espace pour une participation significative de la société civile africaine, ce qui comprend rendre les politiques et bureaux nationaux ainsi que les prises de décisions relatives au projet ouverts et accessibles à la société civile.
  • Les gouvernements africains et les institutions financières de développement devraient promouvoir le développement et les infrastructures qui soutiennent le bien-être social, les industries nationales, les petites entreprises et les petits exploitants agricoles, et non le modèle de développement défaillant d’extraction et d’exportation, seulement.
  • La Banque africaine de développement devrait s’abstenir d’investir dans des projets d’énergie polluante tels que les centrales au charbon, et revoir sa politique énergétique afin de respecter cet engagement.
  • Les institutions financières chinoises, la nouvelle banque de développement et d’autres institutions financières du développement en Afrique devraient en outre être plus transparentes et développer des mécanismes de responsabilité efficaces pour orienter leur financement du développement en Afrique
  • Le transfert de la prise de décision en matière de développement des gouvernements vers les entreprises et l’affaiblissement des normes pour faciliter l’investissement privé par des initiatives telles que le Pacte avec l’Afrique est préoccupant. Les pays africains devraient renforcer leurs cadres politiques et juridiques nationaux et leurs systèmes judiciaires pour garantir que le développement respecte les droits humains et qu’il existe une responsabilité et un accès adéquats aux recours en cas d’impacts négatifs.
  • Les pots-de-vin et la corruption constituent une grande menace qui entrave la mise en œuvre effective de la plupart des projets; et devrait être abordé par les institutions de financement du développement et les gouvernements africains.
  • La durabilité financière, économique, sociale et environnementale des pays doit l’emporter sur l’intérêt des investisseurs privés. La Banque mondiale devrait revoir en détail ses directives sur les dispositions contractuelles relatives aux partenariats public-privé (PPP) et supprimer toutes les suggestions selon lesquelles les pays peuvent offrir des dispositions qui les désavantagent sérieusement dans le seul but de permettre des investissements du secteur privé. Cela permet simplement aux institutions financières de développement d’atteindre leur objectif visé d’accroissement de la mobilisation des financements privés sans maximiser les financements qui profitent au développement.

LES PARTICIPANTS RECOMMANDENT CE QUI SUIT EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ CIVILE:

  • La société civile devrait encourager le développement pris en charge par la communauté, en s’engageant de manière proactive avec les communautés, en renforçant l’organisation locale et la capacité de développement pris en charge par la communauté.
  • La société civile devrait veiller à ce que les voix et la participation des communautés soient prises en compte lors des activités de plaidoyer, de négociation et d’engagement avec les institutions de financement du développement.
  • Les groupes de la société civile devraient établir des partenariats et collaborer entre eux mais aussi partager des compétences techniques et des connaissances pour renforcer les capacités en termes d’activités de plaidoyer et d’engagement avec les institutions de financement du développement et les autorités nationales.
  • Les groupes de la société civile devraient adopter des approches globales en matière de plaidoyer et d’engagement avec les institutions financières de développement et les gouvernements africains en impliquant d’autres parties prenantes et groupes d’intérêt à l’échelle nationale.
  • La société civile devrait recourir davantage aux campagnes de plaidoyer et de communication pour faire pression en faveur du respect, ainsi qu’en faveur des recours et de la responsabilité, en cas de violation ou d’impact négatif du projet.

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Le comité organisateur de l’atelier a inclus: African Coalition for Corporate Accountability et la Coalition pour les droits humains dans le développement, avec Accountability Counsel, Both ENDS, Centre for Applied Legal Studies, Economic and Social Rights Centre – Hakijamii, Friends of the Earth – US, International Accountability Project, Heinrich Böll Foundation, International Rivers, Jamaa Resources Initiative, Lumière Synergie pour le Développement, Public Interest Law Center, Zimbabwe Environmental Law Association.

Les participants à l’atelier étaient: AFREWATCH, Africa Development Interchange Network, African Forum and Network on Debt and Development, African Law Foundation (AFRILAW), Africa Network for Environment and Economic Justice (ANEEJ), Buliisa Initiative for Rural Development Organisation, Centre for Human Rights, Green Advocates, Kenya Land Alliance, l’Observatoire de la Société Civile Congolaise pour les Minerais de Paix / OSCMP-RDC, Le Centre du Commerce International pour le Développement, Legal Resources Centre, Minority Rights Group, Save Lamu, Sengwer Indigenous Peoples Programme, South Africa Institute for International Affairs, University of Johannesburg, Women Action Towards Economic Development.

(Télécharger le communiqué en français , espagnol  et en anglais)

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